«Pour une réelle volonté de collaboration et de concertation»
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Sauvegarde du patrimoine archéologique et aménagement du territoire ! Quelle archéologie choisir ? Celle du sauvetage d’urgence après une découverte fortuite ou celle de l’archéologie préventive ? L’archéologie préventive a acquis une plac«Pour une réelle volonté de collaboration et de concertation»
Sauvegarde du patrimoine archéologique et aménagement du territoire ! Quelle archéologie choisir ? Celle du sauvetage d’urgence après une découverte fortuite ou celle de l’archéologie préventive ? L’archéologie préventive a acquis une place majeure de par le monde et elle a profondément modifié les méthodes et les pratiques de la recherche. Aujourd’hui, la récession économique et les grands travaux d’infrastructure des différents plans de relance ont un fort impact sur le patrimoine et sur la profession d’archéologue. Le risque archéologique variant en fonction de la densité des vestiges dans le sous-sol, la présence archéologique n’est pas une simple vue en Algérie et notamment à Tipasa, c’est une certitude. Le débat sur ce thème a toujours été très vif entre les spécialistes, notamment les archéologues, les gestionnaires des sites patrimoniaux, les urbanistes et les autres aménageurs. Y a-t-il eu une expérience d’une fouille préventive à Tipasa où vous avez exercé durant deux longues décennies ? Suite à la découverte fortuite de vestiges archéologhiques mis au jour lors des travaux de fondation de la nouvelle poste de Tipasa en 1991, les autorités culturelles algériennes ont fait appel au ministère italien des Affaires étrangères pour réaliser un diagnostic archéologique du site exhumé. Une campagne de fouille fut organisée durant l’été 1991 sous la direction de Mme Andreina Ricci et son équipe de l’université de la Sapienza de Rome composée d’une architecte et de trois archéologues. La partie algérienne a réuni les membres de la circonscription archéologique de Tipasa (CAT) composée d’une archéologue, une historienne, trois jeunes architectes, un technicien supérieur en dessin, un sismologue et une spécialiste de la céramique antique. Cette campagne a permis aux membres de l’équipe italienne d’étendre et d’enrichir leurs connaissances d’un site classé sur la liste du patrimoine culturel universel et aussi aux membres de l’équipe algérienne de bénéficier d’un savoir-faire et d’une initiation à l’archéologie préventive dans la ville de Tipasa. Les fouilles ont mis en évidence deux points. Le premier c’est la partie de l’ancienne cité et des vestiges épars qui ne sont pas monumentaux et qui peuvent contribuer à l’interprétation générale de l’organisation de l’urbanisme et son évolution durant l’antiquité, tandis que le second point, c’est qu’il n’y a pas de conflit entre l’étude des restes in situ et le développement moderne de la cité sous réserve qu’il soit permis d’analyser systématiquement toutes les découvertes, y compris celles sporadiques ou occasionnelles. Tipasa, site du patrimoine culturel mondial, est encore enfouie sous des sédiments qui peuvent à l’avenir révéler des surprises aux archéologues au moindre coup de pelleteuse. Quel est votre commentaire ? Une grande partie de l’ancienne cité antique est encore ensevelie sous des strates alluvionnaires de plus de quatre mètres et sur lesquels la ville moderne fut installée. Il ne faut pas oublier que la localité côtière de Tipasa est un site riche en patrimoine historique caractérisé par la succession de nombreuses civilisations qui, depuis les temps géologiques jusqu’à la période contemporaine, ont laissé des traces indélébiles, des monuments spectaculaires tels que le Mausolée royal de Maurétanie connu sous l’appellation de Tombeau de la chrétienne, les édifices originaux, les vastes nécropoles, les objets et les collections archéologiques, les créations culturelles, religieuses et sociales dont nous sommes redevables. Ces archives matérielles constituent la mémoire de la cité, de la région et sont à la fois l’expression de l’identité culturelle et également un élément indissociable du patrimoine universel. A ce titre, ils apparaissent d’une importance stratégique pour la restitution de l’histoire nationale, mais nous constatons avec tristesse et contrition qu’ils subissent ainsi que leurs environnements immédiats des destructions, des démolitions, des modifications ou des démembrements dus essentiellement aux processus du développement socioéconomique. La triste réalité du nouveau port de Tipasa qui défigure non seulement le sky-line, mais sépare les deux parcs archéologiques qui constituaient un continuum urbain antique. Que faire alors et comment faire ? Allons-nous freiner le développement des cités ? Il est vrai que ce développement constitue effectivement une exigence incontournable, mais il ne devrait pas justifier la destruction et la disparition du patrimoine ; en d’autres termes et pour éviter une telle situation, qui avouons-le est parfois dramatique, il suffirait d’instaurer entre les différents intervenants, les élus locaux, les aménageurs et les services chargés de la protection du patrimoine culturel une réelle volonté de collaboration et de concertation afin de dégager des solutions adaptées et rationnelles de préservation du patrimoine archéologique dans l’intérêt de notre pays. Il est vrai que la sauvegarde du patrimoine culturel n’est pas une affaire de professionnels ou de spécialistes, mais qu’elle est avant tout une manière de se projeter dans l’avenir et de donner un sens à notre présent, tout en prenant compte des considérations les expériences et les enseignements du passé. Et là intervient l’archéologie préventive qui a pour objectif d’assurer, sur terre et sous les eaux, la détection et l’étude scientifique des vestiges susceptibles d’être détruits par des travaux liés à l’aménagement du territoire et proposer leur intégration au sein du projet d’aménagement. L’exemple de la fouille préventive de la poste de Tipasa illustre bien notre propos, mais il n’a pu aboutir complètement car le programme d’intégration des vestiges découverts, validé par l’Unesco a été modifié parle maître d’œuvre qui n’était autre que la direction des postes et télécommunication de la wilaya de Tipasa. Tandis que le second exemple, qui est un cas d’école et a abouti d’une manière extraordinaire, c’est la fouille de la Place des Martyrs d’Alger, sur le site de la station du métro, pourtant c’est un site classé aussi sur la liste du patrimoine culturel universel de l’Unesco. Read more