«Le changement des habitudes de consommation est l’un des objectifs marketing des opérateurs économiques»
A la faveur du boom des chaînes de télé dédiées à la cuisine et au changement des habitudes de consommation des Algériens, le marché des ustensiles de cuisine et des différents ingrédients a connu un bouleversement ces dernières années. Quelle explication donner à la propulsion de ce commerce ?
Vous savez, de nos jours, presque toutes les chaînes de télévision, notamment les plus grandes, proposent des émissions culinaires télévisées avec un format qui leur est propre.
Ce n’est pas l’effet du hasard si elles fleurissent, cela veut tout simplement dire que l’audience est au rendez-vous. Cependant, ces émissions ont toutes en commun la mise en valeur d’un ou plusieurs chefs de cuisine.
Il est évident que les médias, notamment la télé qui est le premier support, ont joué un rôle important dans le développement de l’image de la cuisine pour la rendre plus accessible, et qui, finalement, sera utilisée pour faire connaître et promouvoir un produit ou une marque. Ces émissions sont aussi un moyen pour les chefs cuisiniers d’assurer la promotion de leurs restaurants ou gagner en notoriété.
En Algérie, comme ailleurs, cette médiatisation a permis de renouveler notre quotidien en matière culinaire sans oublier, comme vous l’avez évoqué, un grand changement opéré dans nos habitudes et choix de consommation. Parfois on s’étonne de ces changements, oubliant au passage que le changement des habitudes de consommation est l’un des objectifs marketing de nos opérateurs économiques qui actionnent les médias pour atteindre cet objectif afin de gagner de nouvelles parts de marché.
Cependant, les concepts ont évolué, en passant de l’apprentissage vers plus d’originalité. Nous avons des émissions par exemple centrées sur le thème des ingrédients afin de confectionner une recette originale ou innovante, créant une forte demande sur le marché. Ces mêmes émissions ont également contribué à donner plus de visibilité aux ustensiles, accessoires et outils de préparation utilisés dans une cuisine, suscitant curiosité et intérêt chez la ménagère, ce qui a aussi donné naissance à un grand marché en Algérie
Idem pour la restauration avec l’arrivée de nouvelles chaînes…
Effectivement, l’arrivée des émissions dédiées à la cuisine a médiatisé les différentes professions telles que celles des restaurateurs et des pâtissiers à travers les chefs cuisiniers qui les animent et qui, souvent, sont à la tête de ce genre d’établissement. Ces programmes ont aussi développé une certaine curiosité chez certains de nos jeunes, qui s’intéressent de plus en plus à ces métiers, des parents encouragent même leurs enfants à faire une formation dans le domaine de la cuisine ou de la pâtisserie, car ces métiers manuels ont une meilleure réputation grâce à la télévision.
Comment encadrer ce segment et comment en tirer profit ?
Si on prend le segment des ustensiles de cuisine, nous remarquons que la demande augmente d’année en année, notamment pour les ustensiles pratiques qui enregistrent une forte demande. Le marché des ustensiles de cuisine se caractérise par un nombre important d’acteurs et une intensité concurrentielle importante dans la course à la taille critique, dominée surtout par les produits importés. Pour profiter de l’essor du marché des ustensiles de cuisine, les fabricants adaptent de plus en plus d’appareils professionnels à une utilisation grand public, avec des pratiques commerciales efficaces, pour atteindre le plus rapidement la taille critique.
Nous enregistrons un grand retard dans ce créneau en Algérie, malgré une opportunité de marché importante qui profite surtout aux produits étrangers. Le marché des ustensiles de cuisine devrait continuer à progresser au rythme des innovations techniques et esthétiques.
Le savoir-faire est l’élément essentiel dans le développement de cette activité, qui, malheureusement, fait défaut chez nous, mais qu a peut être acquis, grâce à un partenariat gagnant-gagnant avec des partenaires professionnels qui pourraient éventuellement profiter des prix avantageux, de notre matière première, de notre marché, et de l’énergie et main-d’œuvre bon marché, et nous, de notre côté, produire ces ustensiles localement pour répondre aux besoins de notre marché domestique, et pourquoi pas viser les marchés extérieurs.
Ce marché ouvre également la voie à l’informel. Quelle solution adopter justement pour y faire face ?
L’économie informelle en Algérie représenterait plus de 50% du PNB selon certaines enquêtes. Face à l’ampleur du phénomène, l’Etat a engagé plusieurs actions pour lutter contre l’informel qui gangrène notre économie, mais qui, malheureusement, est devenu une réalité indéracinable, représentant une part importante de l’économie nationale, même si on peine à en avoir des chiffres réels.
Parler des solutions revient à établir un diagnostic profond afin de lever les différents blocages qui affectent notre système de production. Néanmoins, en Algérie, le phénomène de l’économie informelle touche tous les secteurs, notamment celui des ustensiles, mais qui n’est pas facile à estimer ni mesurer, ce qui rend difficile l’approche pour l’éliminer ou, du moins, réduire son influence.
D’où la nécessité de mettre en place un mécanisme de suivi et de mesure, qui est un préalable à l’élaboration d’une politique publique efficace de lutte contre l’informel en passant, comme première étape, par l’instauration d’un climat de confiance qui pourrait éventuellement encourager et inciter les acteurs de l’informel à rejoindre la sphère légale. La deuxième étape consisterait à s’attaquer aux éléments saillants des aspects informels. Il s’agit des petits métiers et unités de production qui alimentent les secteurs de l’informel.
Le secteur formel aussi via des ventes sans factures et qui représente le poste le plus important en termes de fraudes fiscales et un flux intérieur non négligeable de marchandises non déclarés qui alimente aussi le marché parallèle. J’ajouterai à cela les importations parallèles ou la contrebande, qui représente des flux extérieurs importants de marchandises non dédouanées et non fiscalisées, alimentant le marché parallèle en produits en tous genres.
Pour conclure, il faut se rendre compte que l’existence de ce phénomène est due aux défaillances du modèle économique algérien. Alors, il faut se mettre sérieusement au travail pour corriger les choses.